Nathaly Riverin a l'entrepreneuriat tatoué sur le coeur

Publié sur le site web du Réseau M, 27 août 2018On peut lire l'article ici.

« L’ENTREPRENEURIAT A ÉTÉ LE FIL CONDUCTEUR DE TOUTE MA CARRIÈRE », AFFIRME NATHALY RIVERIN, PRÉSIDENTE DE ROUGE CANARI ET EX-GRANDE PATRONNE DE L’ÉCOLE D’ENTREPRENEURSHIP DE BEAUCE.

Le parcours professionnel de Mme Riverin est fascinant. Dès ses études en économie, elle est saisie par le phénomène de l’entrepreneuriat. «C’est la première chose qui a capté mon attention, dit-elle. J’ai rapidement réalisé que l’entrepreneuriat constitue une solution au sous-développement économique qui frappait le Québec, mais aussi partout dans le monde. Par la suite, je l’ai longuement étudié. C’est une passion.»Alors qu’elle enseigne à HEC Montréal, son intérêt pour l’entrepreneuriat la conduit naturellement à la Fondation de l’entrepreneurship, qui chapeaute le Réseau M. C’est au sein de la Fondation qu’elle lance son premier véritable projet d’envergure, en collaboration avec HEC Montréal : un Centre de recherche et de vigie sur la culture entrepreneuriale. «C’était un projet multimédia et, en soi, un phénomène d’intrapreneurship. Ça a confirmé que j’étais davantage une entrepreneure sociale qu’économique car, par cette expérience, nous voulions développer l’entrepreneuriat par des initiatives entrepreneuriales!»Le but ultime de ce centre de recherche : mettre l’entrepreneuriat sur la map, faire connaître le phénomène auprès de la population, mousser sa popularité, le documenter et, notamment, faire en sorte que les agents de développement économique soient mieux outillés pour défendre l’entrepreneuriat et les entrepreneurs.« Au tournant des années 2000, l’entrepreneuriat était un phénomène nouveau au Québec, dit-elle. Ce n’était pas très porteur. La culture entrepreneuriale, les gens ne connaissaient pas ça. »

L’INDICE ENTREPRENEURIAL QUÉBÉCOIS

Mme Riverin crée donc le Centre de recherche et de vigie sur la culture entrepreneuriale avec Régis Labeaume, l’actuel maire de Québec, qui présidait alors la Fondation de l’entrepreneurship. C’était pratiquement une entreprise en soi, car le centre avait son propre budget, financement, personnel et produits. «Ça a marché très fort! Et c’était au cœur de ma spécialité : mesurer l’entrepreneuriat sur tous les territoires, pour l’améliorer. C’était même mon sujet de recherche pour mon doctorat!»Rapidement, l’équipe de Mme Riverin traduit ses travaux dans un Indice entrepreneurial, un outil de mesure unique qui n’a plus besoin de présentation dans les milieux économiques, le monde des affaires ou les médias. « Mais il a fallu le mettre au point, le peaufiner, le vendre aux décideurs. Il a rapidement fait sa place dans le paysage québécois et la communauté entrepreneuriale. Il a surtout permis aux agents de développement d’un territoire donné de se parler et de se concerter. Pourtant, au début, en 2007, le concept d’entrepreneuriat n’était pas populaire et même assez abstrait, tant au sein de la population que chez les agents de développement. On avait de la difficulté à avoir des budgets! »

DE L’INDICE À L’ÉCOLE

Une rencontre déterminante change la donne cette année-là : Nathaly Riverin rencontre l’entrepreneur vedette Marc Dutil, grand patron d’un fleuron québécois du Québec Inc., Canam. Il cherchait du soutien pour mettre sur pied son projet d’École d’entrepreneurship de Beauce (EEB) et ultimement quelqu’un pour diriger l’école. «Il voulait créer un lieu d’élite pour les entrepreneurs, mobiliser les gens d’affaires autour de ce projet et l’entrepreneuriat en général. À l’époque, au Québec, on était rendus là : que les grands chefs d’entreprises mettent l’épaule à la roue. M. Dutil a réussi. Avec la Fondation, nous avons donc soutenu les premiers pas de l’école et, par la suite, et je suis passée à la direction de l’ÉEB.»Mme Riverin parle de l’École comme d’un projet fascinant, qui permettait de capter l’expertise des vedettes du Québec Inc. et de la transmettre à des entrepreneurs, qui en avaient besoin pour faire progresser leur entreprise. «J’avais le chapeau d’entrepreneure au quotidien, même si je dirigeais une OBNL. C’était une lutte de tous les instants pour développer l’École.»Entre sa première rencontre avec Marc Dutil, en 2007, et le décollage, en 2010, la petite équipe de Mme Riverin met les bouchées doubles. «Au lancement de l’École, les universités nous regardaient de haut. Les gens étaient surpris qu’on ose offrir un programme de formation qui coûtait 55 000$ aux entrepreneurs participants. Au Québec, on est habitués à la quasi-gratuité. On a défoncé plusieurs portes.»L’École crée des programmes s’adressant à toutes les générations d’entrepreneurs, qui étaient très mal desservis à l’époque. Elle accueille des étudiants de 15 à 85 ans!«On l’a bâtie bottom up, de manière très informelle, même pour les programmes. C’était un fonctionnement très collégial. Pendant plusieurs années, ma vie était écartelée entre Montréal et Saint-Georges. Ce fut assez difficile pour ma famille. Avec les années, la gestion de l’école est devenue plus managériale, ce qui est normal.»

UNE AUTRE ÉTAPE

Au bout de sept ans, elle sentait que l’école avait atteint une certaine stabilité et qu’elle était mûre pour passer à une nouvelle étape professionnelle. Il y a trois ans, après plusieurs mois de réflexion, elle fonde Rouge Canari, une firme de consultation spécialisée dans le développement de nouveaux projets en entrepreneuriat. « J’avais un désir profond de communiquer mes expériences et de faire connaître de nouvelles tendances. Avec Rouge Canari, on établit des ponts entre les organisations et les entrepreneurs. On permet aux grandes organisations de se rapprocher des entrepreneurs. »Elle obtient un mandat important du gouvernement du Québec : la restructuration du mouvement Femmessor, qui se traduit désormais par la fusion de 18 entités en une seule grande organisation, qui permettra de développer encore plus activement l’entrepreneuriat au féminin partout au Québec.Puis, Rouge Canari crée une série de produits et d’ateliers de formation, dont le bien nommé « Parlez-vous l’entrepreneur?» Mme Riverin veut coacher les équipes pour mieux les accompagner dans la croissance. Le programme s’adresse à des gens d’horizons très différents : entrepreneurs, dirigeants d’OBNL, techniciens comptables, avocats, banquiers, représentants de ministères… Tout ce monde a son propre langage, et Mme Riverin cherche à adapter celui de chacun pour mieux épauler les entrepreneurs.

L’AVANTAGE DES SPINOFF

Nathaly Riverin obtient ensuite le mandat de positionner le programme d’Initiative Entrepreneuriale de la Fondation des familles en affaires (Business Family Foundation) afin de former des intrapreneurs et de stimuler la formation d’entreprises dérivées, ou spinoff, à partir de compagnies existantes. Il s’agit d’un phénomène courant aux États-Unis ou ailleurs dans les pays riches, mais encore peu connu ici.«C’est une solution très intéressante, qui permet de mobiliser des gens dynamiques au sein de grandes organisations, surtout pour pallier les problèmes de rétention de main-d’œuvre et de mobilisation des jeunes, explique-t-elle. L’intrapreneurship permet aux grandes organisations de stimuler l’innovation. Mon mandat est de faire connaître le concept, d’amener les gens à adopter un parcours d’intrapreneur.»Un grand nombre de géants du milieu des affaires, partout dans le monde, ont amené l’éclosion de nombre de spinoffs. Mme Riverin cite Virgin, qui est en fait une mosaïque de produits ayant essaimé de la maison-mère. «C’est leur façon de croître : on prend l’expertise de Virgin, on l’éclate et on l’applique dans différents marchés, ajoute-t-elle. Ce n’est pas un jeune concept, mais il est méconnu par la PME traditionnelle, surtout au Québec.»Avec 25 % des jeunes Québécois qui ont l’intention d’entreprendre, selon les derniers chiffres issus de l’Indice entrepreneurial québécois qu’elle a contribué à créer alors qu’elle était à la Fondation, Mme Riverin constate que le Québec dispose d’un potentiel intéressant pour les entreprises qui entendent attirer des talents pour développer plus rapidement leurs projets. «L’intrapreneuriat permet de faire face au problème de relève, surtout au sein des entreprises familiales», ajoute-t-elle.En terminant, pourquoi Rouge Canari? «Parce qu’il n’existe pas que des canaris jaunes, répond-elle. Le rouge symbolise une perspective différente. Et, historiquement, les canaris étaient utilisés dans les mines pour avertir du danger. Nous, on avertit qu’il existe des opportunités tout autant que des dangers en affaires, mais qu’on peut y faire face avec succès.»Auteur : Stéphane Desjardins.

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