Ressusciter les centres commerciaux zombies

Publié sur le blog de Potloc.com, 23 août 2018On peut lire l'article ici.Les centres commerciaux zombies, ou dead malls, se multiplient. Et c’est tout un défi de les ramener à la vie.Le phénomène est mondial. Les centres commerciaux tombent comme des mouches. Rien qu’en 2016, 200 malls américains ont disparu. Selon la société REIS, le taux d’inoccupation moyen aux États-Unis était de 9,1% au début de l’année, pour des loyers similaires à ceux de 2006 ! Des 1500 centres d’achats américains actuels, 10% vont disparaître d’ici deux ans, estiment les analystes en immobilier du CoStar Group, cités par le New York Times. Un site Internet, deadmalls.com, en fait même la recension !La cause ? La transformation radicale de l’industrie du commerce de détail (domination des bannières cotées en Bourse alimentées par des sweat shops des pays pauvres, disparition progressive de géants historiques, magasinage et vente en ligne), la crise économique de 2008 et la migration des classes moyennes dans des banlieues dépourvues de pauvres.Si certains centres d’achats peuvent servir de décor à des films de zombies (plusieurs sont loués à cette fin!), d’autres roulent à plein régime. « Si les familles habitant à proximité ont un pouvoir d’achat réduit, il est difficile de financer des projets de relance », affirme Itzhak Ben-David, professeur de finance à l’université Ohio State, cité par Cleveland.com.

UNE OPPORTUNITÉ

Relancer un centre commercial en perte de vitesse est une aventure difficile et risquée, disent les spécialistes. Quand vous perdez des géants comme Sears ou JC Penny et que le gazon pousse dans les craques du stationnement, ça regarde très mal. Pourtant, d’immenses terrains, stratégiquement situés près d’axes routiers importants, représentent d’indéniables avantages.En fait, une minorité des centres d’achats en détresse sont convertis en entrepôts pour Amazon, campus universitaires, immeubles à bureaux, centres hospitaliers ou églises. « Je prédis que les trois quarts seront reconvertis selon la formule style de vie », commente Ben Conwell, un expert du commerce de détail chez Cushman & Wakefeild, un courtier immobilier commercial américain.En fait, la relance d’un dead mall tient davantage de l’urbanisme d’avant-garde…

VIVEZ DEDANS !

«Don’t drive there, live there ! », titrait le Globe & Mail en mai dernier. Le quotidien donne l’exemple du redéveloppement du Honeydale Mall d’Etobicoke, à l’ouest de Toronto. Bientôt, il comptera plusieurs tours à condos, des espaces verts et de nouveaux commerces en bordure de rues.« Les villes passent tranquillement d’une culture dominée par l’automobile vers une mobilité basée sur un cocktail de moyens de transports », explique Brent Toderian, président du Conseil canadien de l’urbanisme. Les centres d’achats entourés d’une mer d’asphalte seront donc reconvertis en espaces urbains verdis, où les transports en commun, la marche, le vélo et les navettes autonomes auront remplacé l’automobile, qu’on relègue, au pire, dans des stationnements souterrains.Mieux, on y ajoute hôtels et salles de spectacles, comme l’a fait le Dix-30, à Brossard, qui deviendra bientôt le terminus Rive-Sud de Montréal du Réseau express métropolitain piloté par la Caisse de dépôt et placement du Québec.À Englewood, Colorado, on a carrément créé un nouveau centre-ville sur les terrains du Cinderella City Mall, jadis le plus grand à l’ouest du Mississipi. Un train léger sur rail dessert maintenant un centre civique, des immeubles d’habitation et une version réduite du centre commercial d’antan, qui tourne à plein régime.À Vancouver, on bâtit présentement 14 tours de neuf à 44 étages dans le ciel du Oakridge Center, qui comporte toits végétalisés, 2600 appartements, 500 00 pieds carrés de bureaux, un million de pieds carrés de magasins donnant sur des rues piétonnes et 10 acres d’espaces verts. Les ventes totalisent désormais 1600$ au pied carré, les deuxièmes meilleures au pays, affirment ses promoteurs.En Virginie, Crosland Southeast s’est associée aux autorités du comté de Richmond pour convertir un centre en décrépitude en nouveau quartier urbain, avec supermarché Kroger, plusieurs immeubles de plus de 1000 appartements, un Supercenter de Walmart et des espaces verts. Sans la coopération des élus, le projet de plus de 120 M$US n’aurait pas vu le jour, confie H. Garrett Hart III, directeur adjoint du Département de développement économique de Chesterfeild.

L’ÉVÉNEMENTIEL ARRIVE!

« Les consommateurs ne veulent pas tous acheter en ligne. L’expérience tactile du magasinage, la foule, l’animation demeurent dans la psyché collective », écrit Eric Rothman, gestionnaire chez CenterSquare, dans le Commercial Property Executive. Les centres commerciaux à succès s’adaptent aux besoins de la clientèle, qui veut de l’ambiance. « Les malls doivent se réinventer, dit-il. Notamment dans l’événementiel. »Au menu : restaurants haut de gamme, centres d’escalade, parcs d’attractions intérieurs, agoras pour spectacles, tournois, pièces de théâtre, activités de cirque, cours de yoga gratuits, cinéma familial et écrans interactifs géants, comme le mur multimédia de trois étages du Samsung 837, situé dans le Meatpacking District de New York.« De nos jours, les gens cherchent un lieu qui a du caractère et une identité. Le centre commercial en est l’antithèse », affirme l’urbaniste Cherie Enns, citée par la CBC dans un reportage sur la reconversion réussie d’un mall d’Aldergrove, Colombie-Britannique.Par Stéphane Desjardins

Précédent
Précédent

Des stratégies pour économiser à la rentrée

Suivant
Suivant

Un nouveau casse-tête pour les propriétaires de condos